| France   
 
  
                
                 Une mobilisation forte, surtout dans les régions Mathieu Magnaudeix et Stephane Alliès * Pari gagné. Le jour où Pôle emploi annonce une nouvelle hause du
          chômage  (toutes catégories confondues, les demandeurs d'emploi
          sont désormais 4 millions en Franc e), les manifestations contre la
          réforme des retraites ont fait le plein. «On
          est à 2 millions et plus»,
          s'avançait François Chérèque, en tête du cortège parisien. «C'est
          un peu plus fort que ce que l'on imaginait. Le nombre d'arrêts de
          travail dans le privé est impressionnant, des salariés du privé
          isolés se sont débrouillés pour venir par leurs propres moyens et
          le public a beaucoup plus mobilisé que le 27 mai»,
        renchérissait son camarade de la CGT, Bernard Thibault.    Bilan
          final: la CGT annonce près de deux millions, la CFDT un peu plus, le
          ministère de l'intérieur moins de 800.000. L'essentiel n'est pas
          dans cette guerre de chiffres. Fin mai, selon les syndicats, ils
          n'étaient qu'un million. On est donc presque revenu aux scors des
          manifs anti-crise du début d'année 2009. De quoi redonner du baume
          au cœur aux leaders syndicaux. «Une
          telle mobilisation un 24 juin, c'est exceptionnel»,
          s'est réjoui le patron de la CGT. Logiquement, le ministre du
          travail Eric Woerth a joué les rabat-joie, soulignant en début de
          soirée que la mobilisation était légèrement plus faible qu'en
          2003, année de la précédente réforme des retraites.  
  A
          Paris, 130.000 personnes auraient défilé selon la CGT, contre
          90.000 le 27 mai – la police évoque 47.000 manifestants. Un
          cortège très classique (calicots et bannières, sono dans le
          camion, chants et slogans), avec une innovation tout de même: une
          myriade de «vuvuzuelas» beuglantes. «On
          en a acheté 600»,
          se vantait la chargée des relations extérieures de la CFTC
          [Confédération française des travailleurs chrétiens], toute
          fière, devant des militants maison en calicot bleu s'époumonant...
          
  La
          province s'est beaucoup mobilisée. «Dans
          certaines villes, on a enregistré deux à trois plus de manifestants
          que le 27 mai»,
          se réjouit Chérèque. L'ouest de la France a défilé en masse,
          comme nos abonnés l'ont raconté sur le blog spécial live de
          Médiapart. «Enorme
          manifestation à Caen. Un monde fou! Jamais vu ça, bien plus encore
          que lors de la manif contre le CPE» (Jean-Pierre Phelouzat); «Saint-Brieuc:
          30.000 manifestants dans un défilé historique de plus de deux km.
          Du jamais vu!» (Emmanuel Esliard). «Très
          forte mobilisation à Tours» (Muniette Muniette); «A
          Evreux, Beaucoup plus de monde encore que pour le CPE. 2h de défilé» (Cosnefroy); «Défilé
          très dense à Bordeaux, comme on n'en avait pas vu depuis un bout de
          temps» (Patrick Rodel). Grosses affluences aussi à Lyon, La Rochelle,
          Angoulême, Quimper, Annecy, Nice, Montélimar, etc. 
  L'affaire
          Woerth et les scandales touchant l'exécutif ont sans doute contribué
          à une forte mobilisation. Mais les syndicats voulaient croire, comme
          Bernard Thibault, que ce «mécontentement
          est d'abord social».
          Certes, disent-ils, le pouvoir est plutôt «fébrile» ces
          jours-ci. Mais de Sud-Solidaires à la CFTC, tous ont soigneusement
          évité de demander la démission du ministre. Pas question de
          personnaliser. «Si
          Woerth part, la réforme des retraites restera la même»,
          résumait Annick Coupé de Sud-Solidaires au début de la
          manifestation. 
 «C'est
          le président qui mène la réforme, le ministre du travail n'est
          qu'un intermédiaire. On peut bien changer d'intermédiaire, ça ne
          changera pas la réforme»,
          renchérit Thibault. «A
          chaque fois qu'on le voit, Woerth nous dit que ce n'est pas lui
          l'arbitre»,
          confirme Jacques Voisin, président de la CFTC. 
Et maintenant? Les
          syndicats demandent à nouveau la «réécriture» du projet. «Avec une telle mobilisation, je ne peux pas imaginer que le chef de
          l'Etat fasse comme si de rien n'était,
          menace Bernard Thibault. A moins de prendre le risque d'un conflit de plus grande ampleur
          encore.» Pour
          François Chérèque aussi, il faut remettre «l'ouvrage sur le métier».
          A l'unisson, tous deux pointent la place démesurée prise ces
          derniers jours par le foot dans l'agenda présidentiel. «Plutôt
          que des états généraux du foot, pourquoi pas un Grenelle des
          retraites?», feint
          de s'étonner Chérèque. 
Mardi 29 juin, ils discuteront en
          intersyndicale des suites à donner au mouvement. Jeudi dans la
          manifestation, Chérèque (CFDT) et Thibault (CGT) évoquaient déjà
          une action symbolique le 13 juillet 2010, jour de l'examen du projet
          de loi en conseil des ministres, et un intense lobbying auprès des
          parlementaires cet été. Piste évoquée: venir aux rendez-vous avec
          des militants qui raconteraient aux députés leur vie au travail et
          diraient pourquoi ils sont contre le report de l'âge légal à 62
          ans, et celui de l'âge à taux plein à 67 ans.  * Article publié sur le site Mediapart.  ****** Première
          réaction du site du NPA «Les manifestations de cette
          journée du 24 juin marquent un tournant. Un cran a été franchi
          dans la mobilisation. Malgré la date tardive, les
          cortèges ont été partout beaucoup plus importants que le 27 mai,
          de 2 à 3 fois plus nombreux, très gros dans les grandes villes,
          mais il faut aussi noter beaucoup de manifestations dans des villes
          plus petites et une forte participation des salarié·e·s du privé. Il est clair que le projet de
          loi présenté par le gouvernement a provoqué un choc, un sursaut… De manière générale,
          l’ambiance était plutôt chaleureuse et combative, et les
          manifestant-es contents de se retrouver si nombreux. Ce succès appelle très vite
          un nouveau rendez vous dès le début septembre, au moment où la loi
          va être débattue au parlement. Dans de nombreuses villes,
          les collectifs unitaires autour de l’appel Copernic – ATTAC
          étaient présents, distribuaient des tracts et proposaient des
          initiatives tout au long de l’été afin de ne pas laisser retomber
          la pression. Si le gouvernement espérait
          passer tranquillement à la faveur des congés d’été et par
          surprise à la rentrée, c’est d’ores et déjà raté ! Ce n’est jamais gagné
          d’avance, mais nous sommes de plus en plus nombreux et nombreuses à
          penser que ce n’est pas perdu d’avance. Les manifestant·e·s
          d’aujourd’hui n’étaient pas dans la rue pour un baroud
          d’honneur, un petit tour et puis s’en vont. Cette journée n’est
          qu’un début. Une idée gagne du terrain : il est possible de se
          battre et pourquoi pas de faire reculer ce gouvernement, imposer le
          retrait du projet de loi !  Christine Poupin (25 juin 2010) Haut de pageRetour
 
 case postale 120, 1000 Lausanne 20 Pour commander des exemplaires d'archive:
 
 Soutien: ccp 10-25669-5
 
 Si vous avez des commentaires, des réactions,
 des sujets ou des articles à proposer:
 
 |